Bajoit Guy, Socio-analyse des raisons d’agir. Études sur la liberté du sujet et de l’acteur
Texte intégral
1D’entrée de jeu, l’auteur nous expose très clairement son questionnement : «Comment l’individu, sujet et acteur de sa destinée personnelle, augmente-t-il sa part de liberté par rapport à son conditionnement socioculturel, psychique et matériel» ? (p.1). La méthode proposée, qualifiée de «socio-analytique», vise à renforcer le pôle de la réflexivité et procède principalement, sous forme de «collaboration active» et de «retour critique», par entretiens, entre huit et douze séances, de deux à trois heures chacune, étalées sur plusieurs mois, les raisons de l’agir humain étant «beaucoup plus embrouillées et inextricables» (p.2) que ce que laissent entendre les théorisations les plus canoniques ou les plus couramment admises.
2La prise en considération, à l’image d’une sociologie de type “clinique”, de ce qui est caché, ignoré ou censuré mérite ici attention et nécessite, en fonction des sensibilités ou des affiliations, le recours à des grilles de lecture en termes d’idéologie, d’habitus ou d’inconscient, les registres de l’“illégitime”, de l’“involontaire” ou du “passionnel” allant le plus souvent à l’encontre de la transparence. Un nouveau paradigme, prenant ses distances avec les références à l’intégration, à l’aliénation, au contrat ou au conflit, s’impose dès lors et privilégie, dans le cadre d’un «modèle culturel de la modernité subjectiviste» (p.8), une double perspective : relationnelle et identitaire, laquelle débouche sur une «matrice motivationnelle» très pertinente.
3Dans une première partie, est tout d’abord examinée de manière détaillée la “question de la liberté”, qu’il s’agisse de processus ou de conditions. Sont ainsi mobilisés les écrits de Simmel, Sartre, Gurvitch ou Touraine. Une fois cet éclairage apporté, place au décryptage des pratiques et des attentes (par exemple de reconnaissance, d’épanouissement ou de bien-être), des tensions existentielles et des logiques qui leur sont associées : songeons à l’affrontement ou à la sublimation, à la substitution ou au refoulement, à l’ajournement ou au renoncement, à la conciliation ou au détachement (confer le récapitulatif, très instructif, des pages 135 à 137).
4Dans un second temps, quatre études de cas sont présentées et discutées. Consacrées à la quête du masculin (Guillaume), au rapport à la marginalité (Joaquim), au défi d’être une femme libérée (Giovanna) ou au combat pour une renaissance (Lia), elles illustrent le bien-fondé, la richesse et la fécondité de la démarche retenue.
5Une contribution, on l’aura saisi, bien argumentée et de qualité, mettant l’accent (à la suite de Bergson, de Popper ou de Boudon) sur la part, que nous avons tous en nous à des degrés divers, d’indécision, d’indétermination ou d’imprévisibilité.
Pour citer cet article
Référence papier
Gilles Ferréol, « Bajoit Guy, Socio-analyse des raisons d’agir. Études sur la liberté du sujet et de l’acteur », Recherches sociologiques et anthropologiques, 41-2 | 2010, 142.
Référence électronique
Gilles Ferréol, « Bajoit Guy, Socio-analyse des raisons d’agir. Études sur la liberté du sujet et de l’acteur », Recherches sociologiques et anthropologiques [En ligne], 41-2 | 2010, mis en ligne le 08 février 2011, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/rsa/261 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rsa.261
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